Les outils de traçage et de dessin
Last updated: lundi 23 février 2015
Lorsqu’on dessine, aujourd’hui, on est habitué à la dénomination : mine de plomb. Or, il ne faut pas confondre comme c’est souvent le cas mine de plomb et pointe de plomb.
La pointe de plomb est un alliage de plomb et d’étain (1/3 d’étain, 2/ 3 de plomb), effilé et emmanché qui servait à dessiner bien avant la mine de plomb. Une pointe de plomb des XIV-XVe siècle, finement décorée, est reproduite dans le dossier d’Arkéo junior sur Les livres au Moyen Age. ((COLLECTIF, Les livres au Moyen Age, dossier dans la revue Arkéo junior n°48, Editions Faton, 1998, p. 24))
La mine de plomb, elle, est constituée de graphite, variété de carbone presque pur employée dans la fabrication de crayons et substituts de mines de plomb et synonyme de plombagine mais ne contient pas de plomb. Le graphite fut exploité à partir de 1654. Il a détrôné la pointe de plomb et la pointe d’argent à partir du XVème. On retrouve les traces d’un premier fabricant de « crayons » à Nuremberg au XVIIème siècle.
La pierre noire, c’est de l’ampélite, un mélange naturel de carbone et d’argile (mines en Bretagne et dans les Pyrénées), en fait un schiste argileux de carbone (Littré) Ampélite vient du grec ampelos qui veut dire vigne et ceci pour deux raisons : sa couleur noire tire vers le violet foncé comme la vigne et on l’utilisait autrefois pour traiter la vigne. C’est le crayon des charpentiers. ((en savoir plus sur la physico-chimie de l’ampélite sur le site du Cirque de Barrosa))
Il est à noter que de la décomposition de l’ampélite, on peut tirer l’alun (sulfate double d’aluminium et de potassium) qui servait pour fixer certains pigments notamment végétaux utilisés pour l’enluminure.
Le fusain : c’est un arbuste ornemental à feuilles sombres et luisantes et à fruits roses capsulaires ressemblant à des anciens bonnets carrés de prêtres. Vers les XVIIIème et XIXème siècle, on calcinait ses tiges pour pouvoir écrire ou dessiner avec, mais déjà au paléolithique, on utilisait de simples torches brûlées et calcinées qu’on posait à même la roche et qui servait de base aux peintures pariétales ((On utilisait aussi du charbon minéral ou du charbon d’os et un oxyde de manganèse disponible dans la nature. Source : VIGNAUD Colette, POMIES Marie-Pierre et MENU Michel, La peinture préhistorique, dans La couleur, Dossier pour la science, hors-série 2000, p. 44)) (grottes de Niaux dans l’Ariège) Le fusain est maintenant essentiellement obtenu à partir de branches de saule. ((source : site dotapea))
La sanguine : c’est une variété d’hématite rouge, le « ferret d’Espagne », base chimique de l’ocre rouge et du rouge de mars. C’est un minerai de fer de couleur gris-noir mais mis en poudre, il rougit. C’est pour cette raison que les grecs lui donnèrent un nom évoquant le sang. L’hématite fut utilisée dès le paléolithique ((utilisation d’hématite naturelle et de synthèse, obtenue par chauffage de la goethite jaune (hydroxide de fer qui perd ainsi son eau). L’étude par diffraction aux rayons X permet de distinguer les deux qui n’ont pas la même taille de cristaux. Les nanopores laissés par les molécules d’eau ont été analysés aussi. Résultat: A Troubat dans les Hautes Pyrénées, le quart des pigments d’hématite utilisés sur la période d’occupation de 11000 à 6500 avant J. -C., étaient obtenus par chauffage. Par contre, à Lascaux en Dordogne, il n’a été utilisé que de l’hématite naturelle peut-être en raison de la suffisante disponibilité de ce matériau. Source : VIGNAUD Colette, POMIES Marie-Pierre et MENU Michel, La peinture préhistorique, dans La couleur, Dossier pour la science, hors-série 2000, p. 44))
C’est au XVIIIème siècle que furent fabriqués les premiers bâtonnets de sanguine (liés à la gomme arabique). ((source : site dotapea))
La sanguine servait au Moyen Age aux dessins préparatoires des fresques. ((Source : site expositions.bnf.fr, article: sanguine))
La sépia : encre de seiche. La seiche est un mollusque céphalopode (sepia officinalis) qui a un organe spécial, dont disposent également le poulpe et le calmar : une glande secrétant de la mélanine qui mélangée au mucus forme de l’encre. ((en savoir plus sur le site bajocien14.com)) Cette encre est noire mais très diluée elle se révèle d’un beau brun-bleuté. Elle fut commercialisée dès l’antiquité. Au moyen-âge, elle était conservée dans des récipients en verre. ((Source : site dotapea))
La pointe d’argent : Technique très ancienne utilisée depuis l’antiquité. L’argent n’est jamais utilisé pur, il est souvent allié à du cuivre (jusqu’à 25 %) Elle laisse moins de trace sur un support non préparé : le papier ou le parchemin devait être enduit d’une substance liée avec de la colle et à base de poudre d’os qui formera une couche abrasive. La pointe d’argent laisse une empreinte qui va brunir avec le temps par oxydation des fines particules de métal déposées sur le support. ((Source : site expositions.bnf.fr, article: pointe de métal))
Dessin XIVe à la pointe d’argent :
- Vierge à l’Enfant devant un édifice de style gothique, Musée du Louvres, (voir dans la base Joconde, fiche détaillée)
Dessin XVe à la pointe d’argent :
- Trois têtes masculines et deux têtes féminines, Derick Baegert, dernier quart XVe s., Musée Condé, Chantilly, (voir dans la base Joconde)
On peut retrouver notamment beaucoup de dessins de Léonard de Vinci ou d’Albrecht Dürer qui sont exécutés à la pointe d’argent.
Dessins d’Albrecht Dürer :
- Une jeune et une vieille femme de Bergen-op-Zoom, 1er quart XVIe, Musée Condé de Chantilly (voir dans la base Joconde)
- Le voyage aux Pays-Bas ; Portrait d’une personne devant l’abbaye Saint-Michel d’Anvers, 1er quart XVIe, Musée Condé de Chantilly (voir dans la base Joconde)
- Portrait du cardinal Albrecht de Brandebourg, archevêque de Mayence, dernier quart XVe s., Musée du Louvres, (voir dans la base Joconde)
La pointe de plomb s’efface, la pointe d’argent ne s’efface pas
Ouvrages à consulter :
- le livre « il libro dell’arte » de Cennino Cennini écrit entre 1390 et 1437, réédité en
CENNINI Cennino, Il libro dell’arte, Berger-Levrault, Toulouse, 1998 ou par L’oeil d’or, collection Mémoires & miroirs, 2009
consultable en ligne en anglais sur archive.org
Arth Maël
Publié sur aisling-1198.org, le 20 mars 2011
Last updated: lundi 23 février 2015
Notes :